Jeudi 18 Ramadan 1445 - 28 mars 2024
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Les effets des péchés sur leur auteur 

Question

J’ai fait le pèlerinage pour mon propre compte. Quand quelques mois se sont écoulés après le pèlerinage, je n’ai pas décelé les signes de l’agrément du pèlerinage comme l’empressement à accomplir les actes d’obéissance. Bien au contraire, j’ai commis beaucoup de péchés. L’année passée, j’ai décidé de faire le pèlerinage à la place de ma mère décédée après avoir sollicité et obtenu l’avis d’un cheikh dans le sens de mon intention. Le cheikh m’a recommandé de multiplier les demandes de pardon dans l’humilité. C’est ainsi que j’ai fait le pèlerinage dans le cadre d’un voyage organisé. Au cours du tawaf d’adieu la bousculade était très dure. Après avoir effectué un tour et demi, nous sommes montés à la terrasse à cause de l’intensité de la bousculade.. Mais nous ne savions pas avec exactitude l’endroit où nous avions interrompu le deuxième tour… Nous nous sommes efforcés de le fixer approximativement et de recommencer le tour inachevé à partir de la terrasse et nous avons continué et terminé notre tawaf.

Après ce dernier pèlerinage, j’ai constaté que chaque fois que je veux commettre un péché – j’en ai commis beaucoup – je ressens une certaine gêne, un pincement de cœur. En revanche, chaque fois que j’entreprends un acte d’obéissance, j’éprouve du plaisir et trouve un sentiment réel et une compassion pour l’Islam et ses adeptes de notre époque… Je reste inquiet à propos des deux pèlerinages et surtout du tawaf. Eclairez-moi. Puisse Allah vous récompenser.

Texte de la réponse

Louange à Allah.

Premièrement, nous vous conseillons, ô auteur de la question, de vous éloigner des péchés majeurs et mineurs. Méfiez vous en autant que faire se peut. Car le péché est porteur de malheurs pour son auteur. Voici quelques uns de ses effets  d’après Ibn al-Quayyim (Puisse Allah lui accorder sa miséricorde) :

1/ Privation de connaissances

Le savoir est une lumière qu’Allah jette dans le cœur. Et le péché éteint cette lumière. Quant Chafii se présenta à Malick pour s’instruire auprès de lui, Malick fut surpris de sa grande intelligence et de sa bonne compréhension, et lui dit :  Je me rends compte qu’Allah a jeté de la lumière dans ton cœur ; ne la laisse pas s’éteindre à cause de l’obscurité qui résulte des péchés . 

2/ Privation de subsistances

Thawbane rapporte dans le Mousnad de l’imam Ahmad que le Messager d’Allah (bénédiction et salut soient sur lui) a dit :  Certes, l’homme peut être privé de subsistances à cause d’un péché qu’il a commis  (rapporté par Ibn Madja, 4022) et déclaré  beau  par al-Albani dans Sahihi Ibn Madja)

3/La détérioration des rapports entre l’auteur de péchés et son Maître (d’une part) et entre lui et les gens (d’autre part).Un des ancêtres pieux a dit :  Quand je désobéis à Allah, j’en vois les effets à travers le comportement de ma monture et celui de ma femme 

4/ Eprouver des difficultés dans ses affaires

Dans ce cas, chaque fois qu’on aborde une affaires, on la trouve très difficile. Pourtant celui qui craint Allah trouve ses affaires facilitées par Allah.

5/Le pécheur constate une obscurité dans son cœur (à l’intérieur de lui-même) ; il la sent comme il sent l’obscurité matérielle. L’obscurité due au péché est pour son cœur ce que l’obscurité matérielle est pour ses yœux. L’obéissance procure de la lumière et la désobéissance de l’obscurité. Et plus celle-ci s’intensifie , plus l’on se sent perplexe, et l’on finit par se plonger inconsciemment dans les innovations, l’égarement et les choses ruineuses, à l’instar d’un aveugle qui marche tout seul dans l’obscurité de la nuit. Cet état se consolide au point que l’obscurité transparaît dans les yœux et le visage, et noircit l’intéressé visiblement.

Abdallah ibn Abbas a dit : » Le bienfait éclaire le visage, illumine le cœur, apporte l’aisance, donne de la force et rend l’homme aimable aux autres. La mauvaise action noircit le visage (de son auteur) , obscurcit son cœur, affaiblit son corps, diminue sa subsistance et le rend détestable »

6/ Privation de l’obéissance

Si le pécheur ne recevait d’autre punition que celle qui consiste à le détourner de l’obéissance ( cela serait assez malheureux) car il passerait ainsi d’une désobéissance à une autre puisque le péché lui barre les nombreux chemins de l’obéissance dont chacun est meilleur que les biens d’ici–bas. C’est comme un repas qui lui cause une maladie et le prive de plusieurs repas plus délicieux .Allah est le garant de l’assistance.

7/Certes, les péchés conduisent à d’autres péchés et imbriquent le fidèle de sorte qu’il lui sera difficile de s’en passer.

8/Les péchés affaiblissent la volonté (de bien faire) et renforcent la volonté de désobéir ; ils éliminent progressivement la volonté de se repentir de sorte à la détruire complètement. Dès lors, l’intéressé se livre à un recours verbal aussi fréquent que mensonger à la demande de pardon et au repentir. Car ce faisant, son cœur est imprégné de péchés, et il persiste à les perpétuer aussi long temps qu’il le pourra. Ceci fait partie des maladies les plus graves et les plus mortelles.

9/ Il (le péché) empêche le cœur de percevoir la laideur du péché et en fait une habitude ordinaire. Dès lors, on devient indifférent aux regards et commentaires des gens.

Les pervers considèrent cet état comme un aboutissement extrême, une source de plaisir .C’est pourquoi il arrive que l’un d’eux trouve dans le péché une source de fierté et en informe celui qui ne sait pas qu’il l’avait commis en lui disant :  ô un Tel ! J’ai fis ceci ou cela  Les personnes qui se comportent ainsi ne connaîtront jamais la paix intérieure puisqu’on leur barre le chemin du repentir ; on le leur ferme le plus souvent. C’est dans ce sens que le Prophète (bénédiction et salut soient sur lui) a dit : «  Tous les membres de ma communauté seront saufs , à l’exception de ceux qui étalent ( leurs péchés) ; ceux qui dévoilent leurs péchés qu’Allah a dissimulés et disent ( après avoir commis un péché) :  ô un Tel ! J’ai fais ceci ou cela le jour tel  Ils se dénoncent ainsi alors que leur Maître les avaient couverts » (rapporté par al-Boukhari, 5949 et par Mouslim,2744)

10/ Quand les péchés s’accumulent, on selle le cœur de leur auteur et il devient insouciant. C’est  dans ce sens que certains ancêtres pieux interprétaient la parole du Très Haut :  pas du tout, mais ce qu’ils ont accompli couvre leurs coeurs  (Coran,87 :14) Ils disent qu’il s’agit de péchés qui s’accumulent. Cela est du au fait que le péché ternit le cœur, et plus les péchés se multiplient , plus profondément le cœur est terni. Ceci finit par faire du péché une habitude. Dès lors , le cœur est couvert par une enveloppe. Si cet état survient après que l’intéressé a été bien guidé et doté de clairvoyance, il  en résulte une démence totale. Dans ce cas, Satan s’empare du fidèle et le conduit comme il le veut.

Deuxièmement, vous dites que vous avez fait le pèlerinage, mais vous n’avez pas décelé les signes d’agrément ( de votre pèlerinage) et que , bien au contraire, vous vous enfoncez davantage dans les péchés. .Nous vous disons que l’agrément dépend exclusivement d’Allah et personne n’est en mesure de vous confirmer que votre action est agrée ou pas .

Le croyant accomplit ses bonnes œuvres sans savoir si Allah les agrée ou pas. Ceci a conduit Ibn Omar à dire : « Si je savais qu’Allah a agréé une seule des mes bonnes œuvres, je préférerais mourir puisqu’Allah a dit :  Allah n’accepte que de la part des pieux  (Coran ,5 :27)

Il est demandé à l’homme de multiplier les bonnes œuvres et de s’évertuer à agir avec empressement et de façon conforme à l’ordre d’Allah et de son Messager. Ainsi, peut on avoir la conscience quitte et demander à Allah l’agrément (des œuvres)

Ô auteur de la question ! Si vous avez effectué un pèlerinage correct, donc débarrassé des actes interdits, vous n’aurez pas à le refaire. Quant aux péchés que vous avez commis, ils n’ont aucune incidence sur la validité ou l’invalidité du pèlerinage. Mais vous en serez tenu responsable. Vous devez vous empresser à vous repentir avant le terme de votre vie.

Troisièmement, vous dites que vous avez interrompu les tours effectués autour de la Kaaba pour monter à la terrasse, à cause de la bousculade. Cette question concerne la succession des tours constitutifs du tawaf.

La Commission Permanente a reçu une question similaire et a répondu en disant qu’il n’ay aucun mal à interrompre le tawaf pour le reprendre à la terrase. Voir les Fatwa de la Commission Permanente (11/230,231-232)

Quant à l’endroit où l’on doit recommencer les tours, c’est précisément là oû on a interrompu les tours au rez de chaussée. Quant à votre effort pour préciser cet endroit, si vous ne pouvez pas y parvenir avec certitude , faîtes votre mieux. Car le Prophète (bénédiction et salut soient sur lui) a dit :  Celui qui doute du nombre de rakaa qu’il a prié et ne sait plus si elles sont trois ou quatre doit retenir ce dont il est sûr (par exemple deux) et compléter la prière ?Ensuite qu’il prononce le salut final et le fasse suivre par deux prosternations  (rapporté par al-Boukhari, 401 et par Mouslim,572)

Voir ach-charh al-mumti, 3/461

Cela étant, votre reprise du tawaf à partir de la terrasse et l’effort que vous avez fait pour recommencer à l’endroit où vous aviez interrompu le rite, ne comportent aucun inconvénient, s’il plaît à Allah.

Allah le sait mieux.

Source: Sheikh Muhammed Salih Al-Munajjid